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La pâleur des jours

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Elle a seize ans, peut-être moins,

le regard un peu flou,

les mains froides comme l'absence.

Chaque matin, se lever est une épreuve,

comme grimper une montagne

avec des poumons trop petits

et un cœur qui bat à contretemps.

Elle se lève avec un poids dans les jambes trop lourdes,

les paupières encore collées aux songes.

Elle marche au ralenti,
Au fond d'elle, un vide,
Elle ne sait dire où ça a commencé
ni pourquoi ça ne finit jamais.

Les absences à l'école s'accumulent,
les professeurs froncent les sourcils,
les camarades se détournent,
les mots s'effacent sur les pages
quand la tête se met à tourner

Les consultations s'enchaînent,
médecins aux mots techniques,
aux mines pressées,
analyses de sang,
échographies,
bilans hormonaux,
prélèvements,
encore des prélèvements.

Elle entend : « fatigue chronique »,
« syndrome viral »,
« peut-être psychosomatique ».
Et puis ce mot : "hypothèse".
Toujours des hypothèses.
Jamais de réponses.

Les carnets de rendez-vous
se remplissent plus vite que les cahiers de cours.
Les feuilles de soins s'entassent,
Les parents comptent, recomptent,
évitent de soupirer à haute voix,
mais les silences pèsent lourd
autour de la table.

La mère la regarde dormir avant l'heure,
la couvre d'un châle
Le père lit en cachette
les forums de santé
où la peur se répand plus vite
que les diagnostics.

Elle pense parfois à la leucémie.
Elle n'ose pas en parler.
Elle lit des choses,
des mots qui piquent :
"maladie auto-immune",
"tumeur osseuse",
"carence grave",
sans savoir où commence la vérité
et où s'arrête l'imagination.

Et pourtant,
ce n'est qu'une anémie,
une simple anémie
que personne n'a encore vue,
trop banale pour alerter,
trop silencieuse pour crier.

Mais dans son corps,
le fer manque comme l'air,
On l'accuse de tout dramatiser,
de fuir, d'exagérer,
alors elle se tait.
Elle s'épuise à sourire
quand tout flanche à l'intérieur.

Elle se perd dans les salles d'attente,
dans les couloirs blancs,
dans les mots croisés de diagnostics croisés.

Un jour, enfin,
un généraliste attentif,
un regard plus long que la moyenne,
une prise de sang bien orientée,
et ce verdict :
anémie sévère par carence martiale.

Elle pleure, mais pas de peur.
Elle pleure parce que ça a un nom.
Parce qu'on peut soigner.
Parce qu'elle n'est pas folle,
ni fainéante,
ni perdue.

Mais tant de jours volés,
tant d'incompréhensions,
tant de soupirs dans les couloirs médicaux,
tant d'argent parti sans retour.

Elle recommence à vivre,
lentement,
mais avec une vérité dans le sang
et une force qu'elle pensait perdue.

Et dans les yeux de ses parents,
l'inquiétude s'efface,
laissant place à une fatigue douce,
celle de ceux qui ont cherché,
et enfin trouvé.

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Le silence des défenses